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Ethiopie #3, Nil Bleu : origines

lac tana captureNil, églises, copains (et) babouins.

Le lac Tana c’est une grande cuve qui collecte les eaux de pluie du nord-ouest de l’Ethiopie. Et ce qui finit par jaillir de son robinet s’appelle… le Nil. Le Nil Bleu, à tout le moins, celui qui descend en trombe à travers chutes et gorges en direction du Soudan et du lent et large Nil Blanc. C’est amusant de me souvenir de février, du Caire et de la route vers Alexandrie. Ici, à 5500km en amont, l’étendue d’eau que j’ai sous les yeux ressemble au Sahara. Le lac est jaune pâle (peut-être une couleur de limon dilué… ou alors c’est qu’il pressent le désert) et parcouru de vagues aux crêtes assez douces, et le ciel est bleu. C’est comme ça qu’il m’apparait, à Gorgora, à 80km au sud de Gondar (soit 4h de bus intercités), alors que je traverse le cimetière de l’église de Debre Sina. A l’heure de la prière, délaissant leurs tâches ou leurs vieilles conserves remplies de t’ella (la bière locale, assez fumée), les villageois y confluent, et ils embrassent les lourds battants de la porte en bois puis y apposent le front, avant d’entrer dans l’enceinte. A l’intérieur de l’église ronde, dissimulées de la lumière par de lourdes tentures blanches, se juxtaposent du sol au plafond des scènes peintes de la Bible.

De l’autre côté du lac, à son extrémité sud, se trouve la péninsule de Zege, sur laquelle sont construits une tripotée de monastères aux fresques vives. Je déchiffre les noms des saints au milieu des peintures en mélangeant quelques lettres mais ça reste honorable.

debre sina
Derrière les rideaux… (Debre Sina)

En redescendant de la colline (la montée au zénith avec mes 12 kilos de sacs fut assez transpirante), une petite fille me court après pour m’offrir deux énormes citrons (écorce épaisse, cabossée, verte) à l’épais parfum. Et puis je repère un terrain de camping en surplomb du lac… peut-être que j’en profiterai si je reviens par ici avec Simon et Mélo…

[Ah une digression, enfin !] Ouais j’ai des visiteurs. Simon c’est un copain d’archéo, on a fouillé ensemble ensemble au Cailar (un village de Petite Camargue où les vieux pétanquent au pastis devant le site et qui, à la Saint-Jean, invite les fouilleurs à partager bonnes terrines et litres de vin. Fermez juste les yeux sur les chiffres du FN). On a déterré des têtes de Gaulois, buté dans tous les clous du chantier, mangé les figues du voisin (et des baguettes au pâté à la pause de 10h) et chanté Canned Heat à tue-tête sur les départementales gardoises. Quant à Mélo vous l’avez peut-être aperçue sur une ou deux photos marocaines, que vous dire, elle a fini six mois de taf dans un pub d’Édimbourg et le 21 octobre (pendant qu’elle vagabondera quelque part en Ethiopie) elle publie son premier roman ça c’est coolos hein hein. (Pas la peine de préciser que je l’ai lu et qu’il est bien.) Et même qu’on aura l’occase de croiser Juliette quelque part entre deux montagnes. Bise les copains, c’est gentil de vous être laissé convaincre de venir dans ce coin de la planète.

Les monastères de Zege ne sont pas loin de Bahir Dar, une ville qui, à en juger par ses palmiers et son bord de lac, semble avoir pour ambition de devenir une petite riviera à l’éthiopienne. La pierre et la mousse de Gondar me manquent un peu, mais je dois avouer que les rues plantées de jacarandas rouges c’est très beau.

Le lendemain, douze heures de bus m’attendent, direction Addis. Ma voisine est gentille et me donne le nom amharique des plantes qu’on croise. Les champs de t’ef tracent partout dans le paysage montueux des carrés vert tendre et le meskel saupoudre les prés à faire pâlir d’envie un impressionniste.

meskel

Après une demi-heure de pause-déjeuner à Dejen, le bus reprend la route et commence à sinuer à travers les gorges du Nil. De nombreux éboulements encombrent une partie de la route et nous font ralentir. C’est souvent des checkpoints de babouins. Les passagers leur jettent parfois de la nourriture. Alors ils courent, les babouins, le long du bus, pendant une minute entière, on se croirait dans un documentaire du National Geographic (non sérieusement si vous restez insensible à ce passage formidable, à la 14ème minute, où, après une bonne chasse dans les eaux canadiennes, les orques viennent religieusement faire un tour dans une petite crique de leur connaissance, pour pousser de petits ultrasons de contentement tandis qu’ils se grattouillent le ventre sur les galets… … et oui. Je sais. Personne n’y reste insensible), et parfois c’est une maman qui court, avec le petit sur le dos, le petit qui ne comprend pas grand-chose et qui n’est pas encore sûr d’aimer la vitesse, et pendant tout ce temps il y a d’autres babouins qui restent auprès des buissons, parce qu’ils ont autre chose à faire, genre rester à l’ombre par exemple, c’est une bonne occupation ça, rester à l’ombre et regarder les cons qui courent.

Carte blog caire addis
De février à septembre, une lente petite trotte bien nilotique…