Ethiopie #9, Chez Rimbaud

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Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s’ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient.

Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux. – Et je l’ai trouvée amère. – Et je l’ai injuriée.

Je me suis armé contre la justice.

Je me suis enfui.

(Une Saison en enfer, le début.)

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C’est le passage obligé. Arthur a vécu trois ans à Harar, de 1888 à 1891, à commercer dieu sait quoi, mais pas des poèmes. Café, gomme, peaux, cotonnade, or, ivoire, chameaux… Ensuite il est revenu se faire amputer à Marseille et puis mourir.

A Harar commence la région somalie de l’Ethiopie. Les minarets côtoient les clochers, le centre entouré de remparts a un air de médina. La pop y est moins dégueue, les samossas moins huileux.

L’ambiance est un peu particulière. Les premiers jours, on va souvent dans les cybers, pour envoyer des mails à tous les amis parisiens. Vérifier que tout le monde est en un morceau. Comme au crépuscule quand on fait rentrer les chèvres. Compter les têtes. Apparemment toutes les têtes sont là, mais de temps en temps, au petit-déjeuner, un écran de télé diffusant CNN nous rappelle qu’on est deux, trois ou quatre jours après le 13 novembre. Souvent on nous demande notre nationalité. C’est surtout ça qui nous fait penser aux attentats. Mais je m’en fous : le 13 novembre, c’est rien d’autre que l’anniversaire de Dorian. (D’ailleurs t’es brun et barbu, c’est plutôt cohérent !)

Le reste du temps, on se promène, on écrit, on mange des samossas. Moi je pense au Somaliland qui m’attend après quelques jours, à Berbera, au golfe d’Aden. Et puis on joue beaucoup au yams. Tellement qu’on a arrêté de jouer pour nous-mêmes, maintenant c’est des tournois internationaux qui se déroulent, on fait jouer le Bhoutan contre le Costa Rica, des tournois d’écrivains aussi : en finale Beckett affronte Proust, et je vous jure que j’ai rien magouillé. C’est Flitwick qui gagne le tournoi Harry Potter. Pas de doute, les samossas patate-piment ça rend vachement productif.

C’est l’hôtel / maison de passes dans lequel on reste une semaine. Jolie coursive qui colle avec le Faulkner que relit Mélo.

A Harar on peut aller au crépuscule nourrir les hyènes. Malheureusement c’est devenu une attraction touristique. Les hyènes mangent leur poids en viande tous les jours, que le boucher a bien pris soin de découper. Elles sont obèses et, quand le type agite un bout de barbaque, elles se redressent lentement et trainent leur énorme panse dans sa direction, avec moins d’appétit que de désespoir.

hyènes harar

Vous pouvez leur donner la viande au bout d’une brochette ou même entre deux doigts, elles vous grimpent sur le dos pour l’attraper avec l’ardeur d’un type en phase terminale. Pauvres mémères. Dans la vieille ville, il y a des milans qui se précipitent en tempête sur de petits bouts de viande qu’on leur donne. Ils ont l’air déjà moins malheureux.

^C7329E001BFA182E5BB26FFDFFFC68DFE7727BEEFA7C58119A^pimgpsh_fullsize_distrEt puis j’ai souvent dans la tête un petit air que j’aime beaucoup et qui s’accorde parfaitement à la ville, enfin je crois, mais je ne sais pas trop ; j’ai toujours eu l’impression que Barbara, dans cette chanson (à 1h07min35 de l’enregistrement. Mais normalement Youtube lancera la bonne), c’est parfois de Rimbaud qu’elle parle.

Tadadada da dadada…

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